Page:Biographie nationale de Belgique - Tome 3.djvu/416

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jamais exemptes de la juridiction des tribunaux de l’Empire, sauf en ce qui touchait leur contingent dans les contributions. Cependant les états, sous le prétexte qu’il pourrait arriver que les gouverneurs des Pays-Bas attentassent quelque chose contre l’un ou l’autre des pays de la Germanie ou contre la paix publique, sollicitèrent de l’empereur une déclaration portant que, dans ce cas, ils auraient à en répondre devant la chambre impériale. Charles se refusa à la donner : il avait juré à ses sujets des Pays-Bas de les maintenir en leurs franchises, libertés et priviléges; il ne lui était évidemment pas loisible de modifier, sans leur consentement, ce qui avait été convenu en 1548. Il persista dans cette détermination, malgré toutes les instances de la diète, et plus particulièrement des électeurs ecclésiastiques, en les assurant du reste que si, de la part des Pays-Bas, il était fait quelque chose contre la paix publique de l’Allemagne, on le trouverait toujours prêt à administrer bonne justice à ceux qui seraient en droit de se plaindre, et à châtier les délinquants[1].

Le roi de Bohème était attendu avec impatience à Angsbourg par l’empereur, par le roi Ferdinand et par toute la diète. Il avait quitté Valladolid le 30 octobre; il s’était embarqué le 17 novembre à Rosas, et avait pris terre à Gênes le 24. Il arriva à Augsbourg le 10 décembre, au matin, ayant couru la poste toute la nuit à la lueur des torches[2]. La nouvelle s’en répandit bientôt dans la ville; elle y causa une satisfaction générale. Les seigneurs aussi bien que les peuples de la Germanie avaient une affection particulière pour Maximilien, qui la méritait par les rares qualités dont la nature l’avait doué[3]. Quelque temps auparavant, le cardinal d’Augsbourg, s’entretenant avec les ambassadeurs de Venise, qui se félicitaient de la prochaine venue du roi de Bohême, leur avait dit : « Vous avez raison de vous en réjouir : pour ma part, j’en suis charmé, ainsi que toute l’Allemagne, laquelle jamais ne souffrira que l’Empire passe à un prince qui ne soit pas allemand, et je ne saurais croire que le roi Maximilien ni le roi des Romains consentent à ce que le prince d’Espagne devienne coadjuteur de l’Empire, car si le roi Ferdinand s’accordait à cet égard avec l’empereur, il courrait le risque de perdre sa réputation et la bienveillance de la nation germanique, qui ne lui fournirait plus de Secours. Jamais d’ailleurs, ajoutait-il, l’Allemagne ne serait tranquille sous le gouvernement du prince Philippe, et des soulèvements y éclateraient sans cesse[4]. » L’électeur de Trèves s’exprimait avec plus de circonspection, mais au fond il pensait comme le cardinal d’Augsbourg : « Nous n’avons pas besoin pour le présent, disait-il, d’un coadjuteur, puisque nous avons un empereur et un roi des Romains. La nomination d’un coadjuteur serait chose qui n’a jamais été usitée depuis que l’élection appartient aux princes de la Germanie[5]. » Aussitôt après l’arrivée du roi de Bohême,

  1. Le Journal de Vandenesse donne une traduction française des différents écrits de la diète et des réponses de l’empereur sur cette question.
  2. « ... Il quale ha corso la notte a lume di torze... » (Dépêche de Morosini et Badoer du 10 décembre 1550 : Reg. cité, fol. 80 v°.)
  3. Dans plusieurs de leurs dépêches, les ambassadeurs de Venise parlent de l’affection que portait à Maximilien la nation allemande. Ils écrivent le '22 décembre : « Non solamente ogni signor thedesco ha sentito piacer et contento che Sua Altezza sia arrivata, ma ciascun'altra persona et tutta questa natione mostra di haverle grande affettione, di modo che non trovano in S. A. ciasa che le dispoccia. » (Reg. cité, fol. 84 v°.)
       Marillac mandait à Henri II, le 16 septembre, que le roi de Bohême était aimé en Allemagne de tout le pays comme prince gentil et de grande expectation, tandis que le prince d’Espagne était haï de tout le monde et des siens mêmes, les Espagnols exceptés. (Ms. cité, fol. 86 v°.)
  4. « Ben potete rallegrarvi, che io ne sento piacere, e tutta la Germania, la qual mai tolerarà che l’Imperio sia in altro principe que di Germania; ne credo ch’I re Massimiliano nè il re assentisea ch’I principe di Spagna sia coadjutore del Imperio; et se il re de’ Romani in questo s’accordasse con Cesare, sarà pericolo che Sua Regia Maestà non perda la reputatione et benevolentia della natione thedesca, ne haverà piu aiuti da lei... : concludendo in fine que la Germania mai staria quieta sotto il governo del principe, ma sempre faria motti... » (Dépêche de Morosini et Badoer du 30 nov. 1550 : Reg. cité, fol. 75.)
  5. « ... Che al presente non haveano bisogno di coadjutore, perchè haveano et un Cesare et un re di Romani; et questo era nuova forma non usitata dapoi che l’elettione era nelli principi di Germania. » (épècêhe des mêmes du 11 nov. : Reg. cité, fol. 62.)