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VOYAGE D′UNE FEMME AUX MONTAGNES ROCHEUSES

montagneux déjà mentionné. Deux mille têtes de bétail du Texas, à demi sauvage, errent par troupeaux à travers les canyons et vivent dans des termes plus ou moins suspects avec les ours bruns et gris, les lions de montagne, les élans, les moutons, les daims tachetés, les loups, les lynx, les chats sauvages, les loutres, les castors, les skunks, les écureuils, les aigles, les serpents à sonnettes et tous les autres habitants à deux pattes, à quatre pattes, vertébrés ou sans vertèbres, de cette région romantique et solitaire. En somme, ils n’ont guère les allures d’un bétail domestique. Ils vont boire en file indienne, les taureaux en tête, et, lorsqu’ils sont menacés, ils prennent l’avantage stratégique d’un terrain sillonné, s’esquivant prudemment dans les creux, pendant que les taureaux font sentinelle et forment l’arrière-garde, en prévision d’une attaque des chiens. Il faut prendre les vaches de force pour les traire : car, à l’état indompté, elles sont aussi sauvages que les buffalos. Mais, vu la sécheresse comparative de l’herbe et le système de laisser têter le veau pendant la journée, une laiterie de deux cents vaches de l’industrie du marchand de bétail ; quelque humain qu’il puisse être, la terreur est son système. Depuis le moment où l’on martyrise le veau pour le marquer, où le fer chaud pénètre dans sa chair frissonnante, jusqu’au jour où, bœuf gras, on le ramène de ses pâturages sans limites pour l’abattre à Chicago, l’animal est dominé par la crainte et la terreur de l’homme.

Les troupeaux pénètrent facilement dans les canyons