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AUX MONTAGNES ROCHEUSES

soi-même que donne dans ce pays l’habitude d’une abstinence complète, peuvent servir d’exemple à tous les hommes. Il me prépara un repas splendide et du thé excellent. J’ouvris après le dîner le sac aux dépêches, et fus enchantée d’y trouver une quantité de lettres de vous ; mais je restai trop longtemps, oubliant que j’avais 20  milles à faire et que pour cela il me fallait au moins six heures. Le temps était alors brillant. La dernière fois que j’avais pris cette route, je n’en avais pas bien compris la magnificence ; mais Birdie était fatiguée, je ne pouvais la presser et la distance me semblait interminable, alors qu’après chaque montagne il me fallait en traverser une autre. Je me trouvai ensuite dans une région sillonnée de nombreux cours d’eau et de ravins profonds, sombres et boisés, de quelques pieds de large seulement. De leurs froides profondeurs, je vis les derniers rayons du soleil disparaître du front des précipices de 4, 000  pieds de haut. À mesure que la nuit s’avançait, il était étrange d’entrer dans l’ombre triste des pins, puis d’en ressortir tantôt sur la glace, tantôt dans la neige, au fond de ces effroyables abîmes. Les loups hurlaient de tous côtés ; on dit que ces hurlements annoncent l’approche de la tempête. Pendant cette course de 20 milles, je rencontrai un chasseur ayant un élan attaché sur son cheval. Il me raconta que non-seulement les Edwards étaient la veille à la cabin, mais qu’ils devaient y rester deux semaines encore, quoique cela ne leur convint guère. Lorsqu’il fit tout à fait nuit, il me sembla que je n’arriverais jamais. À la fin, je triomphai des difficultés de la der-