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AUX MONTAGNES ROCHEUSES

Canada, amorcent l’hameçon avec des vers blancs ou de la viande fraiche, facile à trouver. Souvent on prend des truites dès que l’hameçon est amorcé, et lorsqu’on regarde dans le trou de glace en suivant la direction d’un rayon de soleil, on voit une masse de queues, de nageoires d’argent, d’yeux brillants et de taches cramoisies ; tout un banc de poissons. Ces bêtes tachées de rouge sont belles à voir étendues au soleil, sur la glace bleue. Parfois, après un seul jour de pêche, deux hommes rapportent, en hiver, soixante livres de truites, mais c’est un exercice froid et silencieux. Comme une cuisinière anglaise dédaignerait les tristes ustensiles avec lesquels nous faisons nos friandises ! Nous n’avons qu’un fourneau qui demande à être constamment entretenu avec du bois ; une bouilloire, une poêle, une casserole, et une bouteille en guise de rouleau. Il a fait extrêmement froid, mais je ne souffre pas, même avec mes vêtements insuffisants. Dans mon lit, je mets un morceau de granit très-chaud ; je tire les couvertures par-dessus ma tête et je dors pendant huit heures, quoique souvent recouverte par la neige. Hier, un ouragan a commencé à cinq heures du matin, et le Parc tout entier n’était qu’un tourbillon de neige piquante comme de la fumée de bois. Mon lit et ma chambre étaient blancs, et le froid si terrible, que l’eau chaude que j’apportais de la cuisine dans une bouilloire gelait à mesure que je la versais dans ma cuvette. Puis, la neige a cessé, et un vent impétueux en a chassé la plus grande partie, soulevant celle des montagnes en nuages si épais, que le pic de Long ressemblait à un volcan qui fume.