Page:Bird - Voyage d’une femme aux Montagnes Rocheuses, 1888.pdf/81

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
73
AUX MONTAGNES ROCHEUSES

été ajouté à la maison. Il a lui-même ensemencé la terre et appris l’art difficile de traire les vaches. Mrs Hughes fait tous les vêtements nécessaires à une famille de six personnes, et passe ses soirées, alors que le rude travail du jour est fini et qu’elle est au moment de tomber de fatigue, à raccommoder et à mettre des pièces. La journée n’est qu’une longue oppression, sans repos ni joie, sans le plaisir d’entrevues fortuites avec des gens cultivés. Les rares visiteurs sont des femmes aisées de colons prospères, pleines de l’orgueil de la ménagère et dont le but paraît être de faire sentir à Mrs Hughes combien elle leur est inférieure. Je voudrais qu’elle s’intéressât plus réellement à la venue du dernier veau, aux espérances de la récolte des courges, à la quantité et au prix du beurre ; — mais, c’est à contre-cœur qu’elle a appris à faire du pain et du beurre excellents. Leurs enfants sont charmants ; les garçons sont de petits gentlemen polis et courtois qui témoignent, dans toutes leurs actions et leurs paroles, l’amour qu’ils ont pour leurs parents. On n’entend jamais dans la maison un mot grossier ou dur ; mais l’atmosphère de luttes et de difficultés a déjà produit son effet sur ces petits êtres. Ils pensent toujours à leur mère, ne mangent pas de beurre quand ils pensent que la provision baisse, apportent de l’eau et du bois, fardeaux trop lourds pour eux, spéculent avec anxiété sur la perspective de l’hiver, sur les espérances de la récolte, et, avec tout cela, sont innocents et enfantins.

Je n’ai jamais vu d’enfants dans les États de l’Ouest ni au Colorado, mais des imitations dégradées d’hommes