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LÉON TOLSTOÏ

à cheval et à pied, aussi il a été général en chef », répondait-elle ; et, ouvrant son armoire, elle y prenait de la résine parfumée qu’elle appelait le « parfum d’Otchakov ». D’après elle, le grand-père aurait rapporté cette résine d’Otchakov. Elle allumait le papier à la veilleuse de l’icône et répandait un agréable parfum.

« Outre l’offense qu’elle me fit une fois en me frappant avec une serviette mouillée, ce que j’ai décrit dans l’Enfance, elle m’offensa une autre fois encore. L’une de ses fonctions était de nous donner des lavements quand c’était nécessaire. Un matin, je n’étais déjà plus avec les femmes, mais avec Féodor Ivanovitch, nous venions de nous lever, mes frères étaient déjà habillés, moi j’étais en retard et allais ôter ma robe de chambre et m’habiller, quand d’un pas rapide de vieille entra Prascovie Issaievna avec son instrument. L’instrument consistait en une seringue enveloppée, je ne sais pourquoi, d’une serviette qui n’en laissait voir qu’un petit bout, jaune ; elle avait en plus une petite tasse contenant de l’huile d’olive dans laquelle elle plongeait la seringue. En m’apercevant, Prascovie Issaievna décida que c’était sur moi que ma tante avait ordonné de faire l’opération ; en réalité, c’était pour Mitenka ; mais lui, par hasard ou par ruse, se sentant menacé d’une opération que nous tous détestions, s’était habillé très vite et avait quitté la chambre. Et j’eus beau jurer que le lavement n’était pas pour moi, elle me l’administra.