Elle mourut neuf mois après lui, de chagrin et de douleur.
La mort de sa grand-mère fut pour Léon Nikolaievitch l’occasion de nouvelles réminiscences sur l’importance religieuse de la vie et de la mort. Cette influence, bien qu’inconsciemment sans doute, fut très forte. La grand-mère souffrit longtemps, à la fin elle fut atteinte d’hydropisie. Léon Nikolaievitch se rappelle l’effroi qu’il éprouva quand on le conduisit près d’elle pour lui dire adieu. Couchée haut sur le lit blanc, toute blanche, elle se retourna avec effort vers ses petits-enfants et, immobile, leur laissa baiser sa main blanche, enflée. Mais comme il arrive toujours chez les enfants le sentiment de crainte et de pitié causé par la mort fut bientôt chassé par l’espièglerie, la sottise, la dissipation enfantines.
Un jour de fête, un ami des frères Tolstoï, le petit Milutine, Vladimir, celui qui, au lycée, leur annonça comme une nouvelle extraordinaire que Dieu n’existait pas, ce qui d’ailleurs ne produisit pas une grande impression, vint chez eux comme à l’habitude.
Avant le dîner, une grande gaieté régnait dans la chambre des enfants ; à cette gaieté prenaient part Serge, Dmitri et Léon ; Milutine et Nicolas, plus raisonnables, se tenaient à l’écart. L’amusement consistait à faire brûler du papier dans des vases de nuit qui se trouvaient derrière le paravent. Il est difficile de s’imaginer en quoi cela pouvait être amusant, mais un fait sûr, c’est qu’ils étaient