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VIE ET ŒUVRE

rappelle son rire charmant, bon, et son visage, éclairé de plaisir.

« Le sentiment religieux dont son âme était pleine était évidemment si important pour elle, était tellement au-dessus de tout le reste, qu’elle ne pouvait se fâcher, s’attrister de quelque chose. Elle ne pouvait attribuer aux choses de ce monde l’importance qu’on leur attribue ordinairement. Elle s’occupa de nous quand elle fut notre tutrice, mais ce qu’elle faisait ne remplissait pas son âme, tout était subordonné au service de Dieu, tel qu’elle comprenait ce service[1]. »

Comme il a été dit plus haut, les cadets des enfants, c’est-à-dire Dmitri, Léon et Marie, après la mort de leur grand’mère, vécurent à la campagne avec leur tante Tatiana Alexandrovna, et les aînés, Nicolas et Serge, restèrent à Moscou avec leur tutrice Alexandra Ilinichna. Pendant l’été toute la famille se réunissait à Iasnaia Poliana. Ainsi s’écoulèrent les années 1838 et 1839. L’année 1840 fut marquée par une grande disette. La récolte était si mauvaise que les Tolstoï durent acheter du blé pour nourrir leurs serfs, ce qui les obligea de vendre le domaine Néroutch, qu’ils avaient reçu en héritage. On diminua la ration des chevaux et on cessa de leur donner de l’avoine. Léon Nikolaievitch se rappelle que lui et ses frères, pris de pitié pour leurs chevaux favoris, couraient en cachette dans les

  1. Des notes, mises à ma disposition, en brouillon, et non corrigées. P. B.