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LÉON TOLSTOÏ

heureux de cela ? » Que je l’aimais beaucoup pour cela. Cet homme t’est vraiment attaché. »

« N’est-ce pas étonnant que de voir son vœu ainsi exaucé, le lendemain même, c’est-à-dire qu’il n’y a rien d’aussi étonnant que la bonté divine pour un être qui la mérite si peu que moi. Et n’est-ce pas que le trait de dévouement de Sado est admirable ? Il sait que j’ai un frère, Serge, qui aime les chevaux et comme je lui ai promis de le prendre en Russie quand j’irai, il m’a dit que, dût-il lui en coûter cent fois la vie, il volera le meilleur cheval qu’il y ait dans les montagnes, et qu’il le lui amènera.

« Faites, je vous prie, acheter à Toula un pistolet à six coups, et envoyez-moi, ainsi qu’une boîte à musique, si cela ne coûte pas trop cher. Ce sont des choses qui lui feront beaucoup de plaisir[1]. »

Ce récit est intéressant surtout en ce qu’il montre quelle voie a suivi Léon Nikolaievitch dans son développement moral : de la foi naïve, mystique, de l’immixtion de la divinité dans ses affaires de jeu et d’argent jusqu’à la liberté religieuse complète professée maintenant par lui.

Enfin quelques jours après cette lettre, après avoir arrangé ses affaires de service, Léon Nikolaievitch retourne à la stanitza Starogladovskaia. En route, de la station Mosdok, probablement obligé d’attendre longtemps les chevaux, il écrit à sa tante une longue lettre, comme toujours pleine

  1. Lettre en français dans l’original.