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VIE ET ŒUVRE

savait quelque chose sur Alexandre. Mais j’étais forcé de les désenchanter ; le moment n’était pas encore venu. Ils étaient très offensés qu’on eût voulu lui donner pour femme la sœur du tsar et qu’Alexandre lui eût parlé sur le pont comme à un égal : — « Attends ! » prononça Petka avec un grand geste menaçant. — « Eh bien ! raconte, raconte ! » Quand Alexandre refusa d’obéir, c’est-à-dire déclara la guerre à Napoléon, tous manifestèrent leur approbation. Quand Napoléon, menant après lui douze peuples, marche contre nous, soulevant les Allemands et la Pologne, tous halètent d’émotion.

« Mon camarade, un Allemand, se trouvait là. — « Hein ! vous aussi contre nous ! » lui dit Petka (le meilleur conteur). — « Eh bien ! tais-toi donc », lui crièrent les autres. La retraite de nos troupes faisait souffrir nos auditeurs ; de tous côtés on demandait pourquoi, et ils insultaient Koutouzov et Barclay. — « Pas fameux, ton Koutouzov ! » — « Attends ! » — « Quoi ? Est-ce qu’il s’est rendu ? »

« Quand j’arrivai à la bataille de Borodino et qu’à la fin je fus forcé d’avouer que nous n’avions pas vaincu, ils parurent navrés. Évidemment, je leur portais à tous un coup terrible. — « Tout de même si nous n’avons pas été vainqueurs, eux non plus ne l’ont pas été ! » Quand Napoléon, arrivé à Moscou, attend les clefs et les hommages, un bruit s’élève sur la nécessité de la résistance. L’incendie de Moscou était naturellement approuvé. Enfin le