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VIE ET ŒUVRE

ment illettré. Parfois, illettré comme un novateur et un grand poète qui transforme la langue à sa façon et pour toujours, et parfois illettré comme un officier qui écrit à son camarade, assis dans un blindage quelconque. On peut dire avec certitude que toutes les pages que vous avez écrites avec amour sont admirables. Mais aussitôt que vous êtes indifférent, votre style s’embrouille et devient épouvantable. C’est pourquoi il faudrait revoir et corriger quelques passages. J’ai commencé ce travail et l’ai abandonné. C’est vous seul qui pouvez et devez le faire. Mais principalement, évitez les longues périodes, coupez-les en deux ou trois. N’épargnez pas les points. Avec les mots : quoique, cela, agissez sans cérémonie, supprimez-les par dizaines. Dans les passages difficiles prenez la phrase et imaginez que vous la voulez dire à quelqu’un dans une belle langue parlée.

« Il est temps de finir et il me faudrait dire encore beaucoup de choses. Aux lecteurs moins développés, la Jeunesse plaira beaucoup moins que l’Enfance et l’Adolescence. Ces deux choses plaisent par leur petite dimension et quelques périodes, tel le récit de Karl Ivanovitch. L’homme le plus vide conserve quelques souvenirs d’enfance et se réjouit quand on lui en explique la poésie. Mais le souvenir de la jeunesse (de cette jeunesse vague, désordonnée, riche en coups et humiliations, et que vous développez devant nous) ordinairement est caché dans l’âme et c’est pourquoi il s’obscurcit et s’oublie.