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VIE ET ŒUVRE

ne connaissait personne à Pétersbourg, sauf un juriste, D.-A. Obolensky, qui, pendant notre séjour à Kazan était avocat-consultant dans cette ville. Mitenka vint trouver Obolensky, à la campagne. Celui-ci m’a raconté cette visite en se moquant. Obolensky était un homme très mondain, de beaucoup de tact et de grande ambition. Il racontait qu’un jour qu’il avait des invités (probablement, comme toujours chez lui, des gens du grand monde) ; Mitenka arriva chez lui par la porte du jardin, en bonnet et pardessus de nankin : « D’abord, je ne le reconnus pas. Mais quand je l’eus remis, pour le mettre à l’aise, je le présentai à tous mes invités et lui proposai d’ôter son pardessus. Mais il résultait que sous son pardessus il n’avait pas d’autre vêtement, le trouvant inutile. » Il s’assit et aussitôt, sans être gêné de la présence des hôtes, il adressa à Obolensky la même question qu’à Taneiev : où vaut-il mieux servir pour être utile ? À Obolensky, pour qui le service n’était qu’un moyen de satisfaire son ambition, il est probable que cette question n’était même jamais venue en tête. Mais avec le tact propre à lui, il répondit avec une certaine bonhomie extérieure, lui désignant plusieurs emplois et lui proposant ses services. Mitenka évidemment mécontent et d’Obolensky et de Taneiev quitta Pétersbourg sans rentrer au service, et partit dans son domaine. Il me semble qu’à Soudja il eut un emploi quelconque, mais s’occupa principalement de ses terres.