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VIE ET ŒUVRE

pour son amour, et encore cette pensée que de toutes les jeunes filles que j’ai connues et connais, elle serait la meilleure femme pour moi quand je pense à la vie de famille. Voilà, c’est sur ce sujet que je désirerais avoir votre opinion sincère. Est-ce que je me trompe ou non ? et je désirerais suivre vos conseils : premièrement parce que vous connaissez elle et moi, et, principalement, parce que vous m’aimez et que ceux qui aiment ne se trompent jamais. Il est vrai que je me suis éprouvé très mal parce que, depuis que je suis parti, j’ai mené plutôt la vie isolée que la vie distraite et j’ai vu très peu de femmes. Mais, malgré cela, souvent j’ai ressenti du dépit de m’être lié à elle et je m’en repens. Néanmoins, je me dis que si j’étais convaincu de la constance de son amour pour moi, si elle m’aimait toujours, même pas comme maintenant, mais plus que tous les autres, je n’hésiterais pas une seconde à l’épouser. Je suis convaincu qu’alors mon amour pour elle augmenterait de plus en plus et qu’avec ce sentiment on en pourrait faire une très bonne femme[1]. »

Et les lettres à la jeune fille deviennent plus froides, plus raisonnées. Bien qu’il emploie encore le mot « amoureux » on sent que c’est sans aucun enthousiasme, en plaisantant. Il lui écrit à Pétersbourg où elle est allée passer la saison d’hiver, ce qu’elle désirait depuis longtemps.

Le ton froid des lettres ne lui échappait point.

  1. Lettre en français dans l’original.