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VIE ET ŒUVRE

vit ; malgré moi je regardais de tous côtés. »

Voici ce qu’il écrit à ce propos dans ses Confessions : « Pendant mon séjour à Paris, la vue de la peine capitale m’a montré le néant de ma superstition du progrès. Quand je vis la tête se séparer du corps, et comment l’un et l’autre tombèrent dans le panier, je compris non par la raison, mais par tout mon être, qu’aucune théorie de la raison d’être de tout ce qui est et du progrès ne peut justifier cet acte, et que si tous les hommes au monde trouvaient d’après n’importe quelle théorie, depuis la création du monde, que c’est nécessaire, moi je saurais que ce n’est pas nécessaire, que c’est mal. Par conséquent, ce n’est pas le progrès qui est le juge de ce qui est bon et de ce qui est mal, mais moi avec mon cœur. »

Tolstoï remit à l’automne son voyage à Rome, et au printemps il quitta Paris, allant directement en Suisse, à Genève, où il passa quelques jours. De Genève, Léon Nikolaievitch écrit à sa tante :

« J’ai passé un mois et demi à Paris et si agréablement que tous les jours je me suis dit que j’ai bien fait de venir à l’étranger. Je suis très peu allé dans la société, ni dans le monde littéraire, ni dans le monde des cafés et des bals publics, mais, malgré cela, j’ai trouvé ici tant de choses nouvelles et, intéressantes pour moi que, tous les jours, en me couchant, je me dis : quel dommage que la journée a passé si vite, je n’ai même pas eu le temps de travailler, ce que je me proposais de faire.