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CHAPITRE i


« ANNA KARÉNINE »
ET LES ESSAIS LITTÉRAIRES PRÉCÉDENTS



Après Guerre et Paix, Tolstoï s’était laissé séduire par l’œuvre de l’enseignement populaire qui l’entraîna à la composition du Syllabaire et à d’autres expériences pédagogiques. Par instants il ressentait bien un certain besoin de création artistique, mais la responsabilité morale qu’il se sentait envers le peuple, le désir de lui faciliter la voie du vrai progrès étouffaient en lui ce besoin créateur. Dans sa correspondance de cette époque, nous trouvons la trace de cette lutte intime. Ainsi, en automne 1870, il écrit à Fet :

« Je chasse, mais déjà le suc commence à couler, et je pose la coupe. Est-ce un bon suc ou un mauvais, peu importe, mais c’est très agréable de l’exprimer pendant les longues et merveilleuses soirées d’automne. »

En février de la même année, il lui écrivait :

« Je rêve de vous raconter beaucoup, beaucoup de choses. J’ai lu Shakespeare, Gœthe, Pouschkine, Gogol, Molière, et de tout cela j’ai beaucoup à vous dire. »