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Page:Biriukov - Léon Tolstoï, vie et oeuvre 3.djvu/295

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VIE ET ŒUVRE

damment de mon rapport personnel envers la religion. L’homme sent le danger, il cherche le salut ; et la religion par l’exemple, par l’acte et la parole lui donne le moyen de salut. Pour le sauvage, le sacrifice humain est le salut du danger de sa vie : foudre, incendie, guerre. Pour d’autres, c’est le salut du Dieu vengeur, après la mort. Pour les bouddhistes, le salut est dans le renoncement à la vie ; pour les mahométans, les chrétiens, c’est aussi le salut de la mort.

« Il paraît si naturel et si raisonnable de dire : si le meurtre est la vérité pour un sauvage, l’ascétisme pour un bouddhiste, le sacrifice pour un chrétien, alors, puisque la vérité est une, il est évident que la religion n’est pas la vérité. Mais la religion ne cherche pas la vérité extérieure, elle cherche le salut, et les différents moyens de salut n’excluent pas l’unité du but. L’unité est en cela que chacun cherche le salut et ne le trouve que dans le renoncement de soi-même.

« 5o Chaque homme est complètement satisfait par n’importe quelle religion qui ne présente aucune contradiction. S’il y voit la contradiction, il la change. Le sauvage, tant qu’il ne sait rien de contraire à son idole, nie sa propre volonté, fait son salut par son idole. Mais si un mahométan lui parle d’un Dieu créateur invisible, il l’abandonne, et il n’y a point contradiction. Je suis chrétien, j’ai repoussé la contradiction des icônes, des reliques, des miracles, et je me satisfais des moyens de salut chrétiens, puisque je ne connais pas et ne puis pas me représenter de principe supérieur au principe du renoncement de soi-même, et de l’amour. »