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Page:Biriukov - Léon Tolstoï, vie et oeuvre 3.djvu/370

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LÉON TOLSTOÏ

qui le connaissaient bien, dormait sur un tas de vieux journaux. Son érudition était extraordinaire, et sa grande mémoire faisait de lui un catalogue vivant. La particularité de son christianisme était la foi en une immortalité mystique et scientifique.

Citons encore un homme très proche alors à Tolstoï, Vladimir Féodorovitch Orlov, professeur à l’École du chemin de fer, qui étonnait Tolstoï par son habile interprétation des textes évangéliques dans l’esprit chrétien le plus radical. Dans une lettre à son ami V. I. Alexiev, Tolstoï parle de ces divers personnages et caractérise chacun d’eux ; en même temps qu’il lui raconte la lutte morale qu’il endure à Moscou :

« Merci de votre lettre, cher Vladimir Ivanovitch. Je pense à vous sans cesse et vous aime beaucoup. Vous êtes mécontent de vous. Que dirais-je de moi ! À Moscou, la vie m’est pénible. J’y suis depuis deux mois, et c’est toujours pénible. Je vois maintenant que je connaissais toute l’immensité des séductions dans lesquelles vivent les hommes, mais je n’y croyais pas, je ne pouvais me les représenter ; de même, vous saviez par la géographie qu’il y a le Caucase, mais vous ne l’avez connu qu’en y allant. Et l’immensité de ce mal m’opprime, me désespère, me rend méfiant, et m’étonne : Comment donc ne le voit-on pas ?

« Cela m’était peut-être nécessaire pour trouver sans erreur mon droit chemin. Deux choses se présentent à moi ; Croiser les bras et souffrir sans rien faire, en s’abandonnant au désespoir, ou se réconcilier avec le mal ; s’étourdir par les cartes et le vide de la vie mondaine. Par bonheur, je ne puis