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Page:Biriukov - Léon Tolstoï, vie et oeuvre 3.djvu/381

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VIE ET ŒUVRE

cela, le calme et l’isolement sont nécessaires. Je sais que la communion avec nos semblables est très nécessaire, et les trois mois que j’ai passés à Moscou m’ont donné beaucoup. Sans parler d’Orlov, de Féodorov, de Sutaïev, j’ai eu l’occasion d’approcber des personnes de la société que je blâmais froidement, de loin, et j’examine ce que j’ai observé. Le recensement et Sutaïev m’ont donné beaucoup. Ainsi ne t’inquiéte pas de moi. Tout peut arriver et partout. Mais ici je me trouve dans les conditions les meilleures et les plus sûres[1]. »

Après un court séjour à Moscou où Tolstoï eut encore à souffrir du désaccord moral qui existait entre lui et les siens, il retourna à la campagne, et nous retrouverons dans leur correspondance les traces de cette lutte intestine.

Le 3 mars, la comtesse lui écrivait :

« La première chose triste à mon réveil fut ta lettre. Je suis de plus en plus convaincue que si un homme heureux, tout d’un coup ne voit que le mauvais côté de la vie et ferme les yeux au bon, c’est qu’il est malade. Tu devrais te soigner. Je dis cela sans arrière-pensée. Cela me semble vraiment. Je te plains beaucoup, et si tu réfléchissais sans parti pris à mes paroles, peut-être trouverais-tu un remède à cette situation. Cet état d’angoisse date de loin. Tu disais : « À cause du manque de foi, je voulais me pendre. » Et mainfenant tu as la foi, pourquoi donc es-tu malheureux ? Ignorais-tu jusqu’à présent qu’il y a des malades, des malheureux, des méchants ? Mais regarde, il y a aussi des bons,

  1. Archives de la comtesse S. A. Tolstoï.