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EN CANOT DE PAPIER.

les arbres. Cela fait, j’allumai du feu en me servant d’allumettes qui avaient échappé au naufrage dans la poche de mon caoutchouc et dans un briquet à l’épreuve, cadeau que m’avait fait M. Epes Sargent, de Boston, quelques années auparavant, quand je remontai la rivière le Saint-Johns (Floride).

Un peu avant la nuit, tout ce qui n’avait pas été gâté par l’eau fut séché et mis en sûreté dans les grands glaïeuls des marais. Le tertre qui me fournit un si utile ombrage est connu sous le nom de « l’île Nog ». Les quelques néfliers qui poussent là pouvaient offrir un bon goûter au voyageur, car dès que les gelées ont amolli le fruit de cet arbre, qui se rapproche de celui du prunier, il devient doux et agréable. Le néflier (diospyrus Virginiana) est un petit arbre que l’on trouve ordinairement dans les États du Sud ou du Centre. Les blaireaux et d’autres animaux mangent ses fruits avec plaisir. L’obscurité profonde vint m’avertir qu’il était temps de chercher un gîte pour la nuit. À deux milles plus loin, on trouve un vieil hôtel de chasseurs, vers lequel je dirigeai mes pas le long de Slaughter-Beach, en priant Dieu que je pusse quitter sain et sauf un lieu qui portait un nom de si mauvais augure.

Un aimable homme, M. Charles Todd, tenait la taverne de Willow-Grove plutôt pour son plaisir que pour le profit qu’il pouvait en retirer. Je ne lui racontai rien de l’incident qui m’avait débarqué à Slaughter-Beach ; mais aux questions qu’il m’adressa pour savoir où était mon bateau et comment il avait pu supporter un coup de vent pareil, je lui répondis que j’avais