Aller au contenu

Page:Bishop - En canot de papier de Québec au golfe du Mexique, traduction Hephell, Plon, 1879.djvu/311

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
268
EN CANOT DE PAPIER.

mon côté, il ajouta : « Voilà comme je suis : je sais comment faire pour vous traiter en ami, comme un blanc, et je me battrais avec quiconque voudrait m’en imposer. Mais je vois que vous êtes un gentleman ; je ne vous traiterai pas comme un nègre ; je vous donnerai ce que j’ai de meilleur. Venez à la maison. »

Alors je reçus toutes sortes d’attentions dans la demeure de ce noir si résolu. La cargaison du canot de papier fut déposée dans un coin de la chambre. La femme et les enfants, assis devant un feu brillant, écoutèrent le récit de mon voyage, et je fis un pot de fort café pour toute la famille. Ce noir savait lire, mais non écrire ; aussi me pria-t-il de lui faire une adresse à mettre sur une balle de coton sea-island d’environ cent soixante livres, qu’il avait récolté et qu’il devait expédier par le bateau à vapeur Lizzie, à Savannah. Pendant que je me reposais la nuit dans mes couvertures étendues par terre dans la seule chambre confortable de la maison, je voyais apparaître et disparaître la silhouette massive du noir, qui se glissait doucement près de moi, se penchant tout doucement pour voir si j’étais bien couvert, et empilant sans bruit des branches de chêne vert sur le brasier, pour combattre l’humidité qui s’élevait de la rivière.

Le lendemain matin, il m’apporta un seau d’eau froide, et ne possédant pas de serviette assez propre pour un blanc, il exigea que je prisse pour me laver les mains et la figure, le tablier de calicot tout frais empesé de sa femme. Au moment de partir, lorsque je proposai à mon hôte de payer son hospitalité et l’excellent déjeu-