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DE M. DE BISMARCK. 1855. 3

la nouvelle qui me concerne, soi-disant venue de Francfort, doit son origine à l’ambassade française de Berlin, et notamment à M. Rothan, qui a passé ici il y a quelques jours pour se rendre à Paris, et qui personnellement ne m’aime pas. M. de Tallenay, ainsi que mes collègues allemands, ont vivement désapprouvé cette attaque de la feuille officielle ; du reste, le premier, qui a de l’expérience et qui est un diplomate fort habile, montre parfois dans l’intimité qu’il n’est pas tout à fait pénétré du tact et de la sagesse avec lesquels on traite les affaires à Paris.


On fait courir ici le bruit singulier que l’empereur Napoléon se rendra en Crimée pour mettre les généraux à la raison, et qu’ensuite, si Sébastopol ne se laisse pas prendre, il conduira son armée à Constantinople pour recueillir la succession de la Porte et dédommager les Français de leur échec en Crimée par la reconstitution de l’empire latin [1].

Je ne puis que louer la conduite de Rechberg; on peut discuter avec lui sans qu’il déclame ou qu’il s’emporte. Il continue à dire que Prokesch reviendra; mais votre excellente dépêche du 16 [2] ne fera pas précisément voir sous un jour plus favorable l’aptitude de M. de Prokesch à remplir les fonctions de délégué président. D’après des communications que Rechberg a reçues de Vienne, le comte de Buol lui-même commence à entrevoir l’avenir sous des couleurs pacifiques. Ces jours derniers, M. de Glinka a été à Cassel ; il a trouvé le prince électeur prêt à suivre fidèlement la politique indiquée par les « motifs du 8 février », si la Prusse en faisait autant. Mais le prince électeur est très-embarrassé à cause des difficultés que la présidence peut lui créer dans l’affaire de la constitution [3], où la Hesse ne pourra peut-être obtenir l’assistance de l’Autriche qu’à condition de lui donner sa voix dans d’autres questions. Le grand-duc de Darmstadt a dit à M. de Glinka que dans tous les cas il marcherait avec la Prusse et qu’il serait heureux de pouvoir donner à son royal beau-frère un témoignage particulier de son dévouement. Voilà ce que me raconte M. de Glinka.

  1. Sur ce projet, comp. aussi plus bas (13 avril 1855).
  2. Cf. plus haut, t. Ier, p. 425, note 1.
  3. Cf. plus bas (22 mars 1855).