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LES BELLES PERSÉCUTÉES


— « Reine, dit le roi de France, aimerais-tu mieux être la première femme d’un homme ou la seconde ?

— J’aimerais mieux être la première.

— Eh bien, tu t’es condamnée toi-même, par ce que tu as fait, et par ce que tu as dit. Prends ton couvert d’or, avec l’assiette et le gobelet. Prends le trol d’or, et les douze fuseaux d’or avec la filière. Prends les deux robes, l’une couleur du ciel, l’autre couleur de la lune, et retourne chez tes parents. »

La reine descendit aussitôt à l’écurie, fit seller un cheval, et retourna chez ses parents. Peau d’Âne demeura dans le château, et devint reine à sa place[1].

  1. J’ai entendu réciter, dans la Gascogne et l’Agenais, deux contes de Peau-d’Âne bien distincts. Celui que je donne ici, a été écrit sous la dictée de Catherine Sustrac, de Sainte-Eulalie, canton de La Roque-Timbaut (Lot-et-Garonne), en présence de ma belle-mère, Mme Lacroix, née Pinèdre, de Notre-Dame-de-Bonencontre, près Agen. Leurs souvenirs concordaient parfaitement. L’une et l’autre m’ont affirmé avoir recueilli ce conte de la bouche de personnes âgées et illettrées, qui le savaient elles-mêmes par une tradition immémoriale. Pendant mon enfance, j’ai longtemps habité, dans l’ancien Agenais : Agen, Marmande, Birac, etc., et je puis ajouter, sur ce point, la garantie de mes propres souvenirs aux déclarations de Catherine Sustrac et de Mme Lacroix. Il existe aussi, en Gascogne et en Agenais, un autre conte de Peau-d’Âne, qui, par la nature et la succession des faits, rappelle exactement celui de Perrault. Les personnes illettrées qui me l’ont récité, le tenaient toutes, directement, ou par intermédiaires, de gens qui avaient lu Perrault.