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Esprits et Fantômes

faire de bruit. Mais elle n’en connaissait aucun. Elle ne connaissait pas non plus le prêtre qui disait la messe, ni les clercs qui lui répondaient. Elle voyait bien ce prêtre remuer les lèvres. Au moment de la consécration, elle vit aussi le clerc brandir la clochette. Mais elle n’entendit ni parole ni tintement.

Le moment de la quête arrivé, un chanoine, que la veuve n’avait jamais vu, passa avec un grand plat de cuivre. Tous les gens y jetaient des écus, des pistoles, et des louis d’or, comme on en voyait autrefois, et comme il n’y en a plus aujourd’hui. Cet argent et cet or, tombaient dans le plat sans tinter. Mais quand le chanoine arriva devant la veuve, la pauvre femme, qui n’avait pas un liard en poche, tira de son doigt son anneau de mariage, et le laissa tomber dans le plat de cuivre.

Au tintement que fit l’anneau, soudain les cierges s’éteignirent tous à la fois. Le prêtre, les clercs, et le peuple, s’évanouirent sans bruit, comme une fumée ; et la veuve demeura seule, dans la nuit, au milieu de l’église de Saint-Gervais.

Les voisins la trouvèrent morte le lendemain matin ; et les chanoines de Saint-Gervais s’étonnèrent de trouver, dans le plat de quête, un anneau d’or, sans qu’on sût qui l’y avait mis[1];

  1. Dicté par feu Bernade Dubarry, de Bajonnette (Gers).