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Page:Bladé - Contes populaires de la Gascogne, t. 3, 1886.djvu/301

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Moralités

la noce, elle fit un sabbat d’enfer. Pendant dix ans, cela recommença vingt fois par jour. L’homme était fort comme Samson, patient comme un ange, et il se disait souvent en lui-même :

— « Si je bats cette malheureuse, je suis capable de l’estropier, peut-être même de la tuer, sans le vouloir. Jamais les juges ne pourraient croire ce que j’ai souffert par elle. Ils commanderaient de me faire mourir. Cela serait un grand affront pour la famille. Mieux vaut faire comme auparavant, et offrir mes peines au Bon Dieu. »

La femme, voyant que son homme ne répondait jamais à ses insultes, et qu’il n’avait pas l’air de prendre garde à ses malices, devint encore plus méchante.

— « Ah ! c’est ainsi, pensa-t-elle. Eh bien ! nous verrons ce soir. »

Le soir, l’homme revint de son champ, las et affamé.

— « As-tu trempé la soupe, ma femme ?

— Non, ivrogne, voleur, mauvais sujet. Je suis lasse de servir un rien-qui-vaille comme toi. Fais ta cuisine, si tu veux. »

Le pauvre homme ne répondit rien. Il alla couper des choux au jardin, alluma le feu, et fît la soupe. Mais, comme il s’apprêtait à la tremper, la femme cassa la marmite d’un coup de pelle à feu.