Page:Blanc - Histoire de dix ans, tome 1.djvu/117

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seillaise fut entendue, chant magique qu’on n’entendait plus depuis bien long-temps !

Le sang allait couler : comment ne pas songer aux suites, si la fortune était favorable ? Fidèles à l’esprit de la charbonnerie, les membres de la vente suprême ne songeaient à imposer à la France aucune forme particulière de gouvernement. La dynastie des Bourbons elle-même n’était pas proscrite dans leur pensée d’une manière absolue et irrévocable. Mais, en tout état de cause, il fallait pourvoir à cette grande nécessité de toutes les révolutions : un gouvernement provisoire. On adopta les bases de la Constitution de l’an III, et les cinq directeurs désignés furent MM. de Lafayette, Corcelles père, Kœchlin, d’Argenson, Dupont (de l’Eure) ; c’est-à-dire un homme d’épée, un représentant de la garde nationale, un manufacturier, un administrateur, un magistrat.

Manuel jusque-là n’avait prêté à la charbonnerie qu’un concours inquiet et indécis. Ayant appris qu’on voulait engager sur le théâtre de l’insurrection ceux qui étaient appelés d’avance à en régulariser le succès, il usa de son influence sur quelques-uns d’entre eux, et notamment sur M. de Lafayette, pour les dissuader du voyage de Béfort ; soit qu’il jugeât l’entreprise mal conçue ou prématurée, soit qu’en réfléchissant aux choses du lendemain, son âme rigide se fût ouverte à une secrète défiance.

Toujours est-il que de tous les hommes influents