Page:Blanc - Histoire de dix ans, tome 1.djvu/172

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tion profonde en Angleterre. À Paris, lord Stuart, dans des entretiens semi-diplomatiques, essaya d’intimider successivement le ministre de la marine, M. d’Haussez, et le président du conseil, M. de Polignac. Le premier repoussa les démarches hautaines de l’ambassadeur anglais avec beaucoup de véhémence[1]. Le second leur apposa une politesse froide et dédaigneuse. Anglais par ses habitudes, par ses amitiés personnelles, par le souvenir de sa jeunesse passée à Londres, par ses manières, et même par son costume, M. de Polignac était, comme homme politique, entièrement dévoué au système de l’alliance russe.

Le sort en fut donc jeté : les préparatifs de guerre se poursuivirent avec ardeur ; l’armée de terre fut rapidement organisée ; et, dans tous les ports du royaume, la tâche des ouvriers fut doublée ainsi que leur salaire.

Les libéraux, cependant, avaient pris l’alarme. Convaincus que cette fougue militaire de la royauté cachait une pensée funeste, ils mirent en doute les résultats de la guerre, exagérant les obstacles, créant à plaisir des difficultés insurmontables, et mettant tout en œuvre pour enrayer les esprits. Le Journal des Débats, surtout, faisait à la politique belliqueuse du cabinet une opposition implacable.

Au ministère de la guerre, on avait entouré M. de Bourmont, dont on cherchait à troubler les pensées par les plus noires prophéties. L’eau manquait, as-

  1. Dans la Conversation qu’il eût avec l’ambassadeur anglais, M. d’Haussez, irrité du ton tranchant que prenait lord Stuart, laissa échapper ces mots : « Si vous désirez une réponse diplomatique, M. le président du conseil vous la fera. Pour moi, je vous dirai, sauf le langage officiel, que nous nous f…… de vous. »