Page:Blanc - Histoire de dix ans, tome 1.djvu/339

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Laréguy. Le projet d’une proclamation orléaniste fut arrêté. M. Thiers la rédigea, et il fut convenu qu’on la publierait dans le National, le Courrier Français et le Commerce. Pour renverser une dynastie, il avait fallu tout l’effort d’un peuple ; pour en créer une autre, était-ce donc assez d’un député et de trois journalistes ?

Toutefois, l’insouciance du peuple, qui était un encouragement aux projets des Orléanistes, pouvait, selon les circonstances, leur opposer un obstacle sérieux. Lorsque, le 30, MM. Thiers et Mignet, suivis de quelques amis, sortirent des bureaux du National, se dirigeant vers la place de la Bourse, et distribuant à la foule, en chiffons de papier, le panégyrique du duc d’Orléans, ils durent être frappés de l’étonnement qu’ils esxcitaient. Sur la place de la Bourse, leur émotion dût redoubler, car des sifflets les y accueillirent.

L’élévation du duc d’Orléans avait naturellement pour contradicteurs les jeunes gens qui, dans la charbonnerie, s’étaient prononcés pour Lafayette contre Manuel. Aussi coururent-ils semer dans Paris leur défiances et leurs antipathies. Quand M. Pierre Leroux, par exemple, vint annoncer aux combattants du passage Dauphine le complot qui se tramait, ce ne fut qu’un cri de fureur. « S’il en est ainsi, disait-on, la bataille est à recommencer, et nous allons refondre des balles. »

Témoin de cette explosion de colère par lui-même excitée, M. Pierre Leroux se rendit précipitamment l’Hôtel-de-Ville pour avertir M. de Lafayette. Il lui peignit sous de vives couleurs ce qui