Page:Blanc - Histoire de dix ans, tome 1.djvu/374

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phin, à son tour, fit dire a Charles que Saint-Cloud était menacé, qu’il fallait aller porter un peu plus loin la monarchie. Et, quelques moments après, avant le lever du jour, Charles X, la duchesse de Berri et les enfants étaient en route pour Trianon, sous la protection d’une escorte de gardes-du-corps. À Ville-d’Avray, les fugitifs purent voir le mot royal effacé sur toutes les enseignes de cabaret. Ce mot, trois jours auparavant, était presque un moyen de fortune pour ces marchands oublieux.

Le Dauphin devait passer la nuit à Saint-Cloud avec les troupes. L’annonce du départ de Charles X avait vivement ému les soldats, et le mouvement fut général. Le 6e de la garde, qui était au point du jour sur le chemin de Ville-d’Avray, fut ramené par un contre-ordre au pont de Saint-Cloud, et retourna, par la grande avenue, dans l’allée qui, du Fer-à-Cheval, conduit à la lanterne de Diogène. Le 1er régiment occupait la place de Saint-Cloud et la grande avenue. Deux bataillons du 5e des Suisses et des lanciers couvraient Sèvres avec une batterie. L’aspect du camp était sinistre, et d’amères pensées se lisaient sur le front de tous ces serviteurs armés d’une royauté en fuite. Les débris de la cuisine royale, mis à la disposition du soldat, répandirent, au milieu de cette grande tristesse, quelques lueurs de gaîté. Mais, pendant que le de la garde et l’artillerie se partageaient en riant ce butin inattendu, les Suisses, placés du côté de Sèvres, abandonnaient leur drapeau, et s’en allaient en semant la route de leurs armes.