Page:Blanc - Histoire de dix ans, tome 1.djvu/455

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dite, foulée aux pieds. Les républicains résolurent donc de faire de l’abolition de la pairie une question de coup de main. Considéré dans ses effets immédiats, leur projet avait quelque chose de puéril et même de ridicule. On devait, de divers points de Paris, se réunir sur la place de l’Hôtel-de-Ville, partir de là pour le palais du Luxembourg en poussant des cris propres à exciter le peuple, envahir le palais, jeter les banquettes par les fenêtres, et sceller les portes. Quelque peu sérieuse que fût en elle-même une démonstration de ce genre, elle pouvait avoir d’immenses résultats dans un moment où le peuple bivouaquait encore sur quelques places, dans un moment où la force publique n’était pas encore en action, et où nul pouvoir ne fonctionnait régulièrement. Mais ce qui donnait à cette démonstration une importance véritable, c’est qu’elle s’appuyait sur l’adhésion, formellement promise, d’un grand personnage que les républicains voulaient compromettre sans retour, et pousser au pouvoir à travers l’émeute. Or, voici ce qui arriva. Dans la nuit du 4 au 5 août, M. Charles Test reçut la visite de M. Marchais, qui lui apportait une lettre par laquelle le général Lafayette les mandait l’un et l’autre à l’Hôtel-de-Ville. Ils s’y rendent sans retard, et sont admis dans l’appartement du général. Le jour commençait à poindre, mais la clarté d’une lampe mourante vacillait encore dans la salle. Sur un lit recouvert de basin blanc, Lafayette était étendu les mains croisées sur sa poitrine et profondément endormis. MM. Charles Teste et Marchais s’assirent en silence au chevet du vieillard, et res-