Page:Blanc - Histoire de dix ans, tome 1.djvu/472

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protestions ? Le nouveau régime aurait en sa faveur, à défaut de la consécration du droit, celle du fait, et on savait bien qu’un peuple n’essaie pas tous les jours d’une révolution.

Aussi la chambre accueillit-elle avec un empressement extrême la communication officielle qui lui fut faite par M. Guizot, de l’acte d’abdication. Quelques députés, et M. Mauguin entr’autres, se récrièrent, à la vérité, sur la nullité d’un pareil acte, disant que la déchéance de Charles X avait été prononcée par la victoire, et que c’était non pas en vertu d’une abdication, mais en vertu de la volonté populaire, que le duc d’Orléans devait devenir roi. Vains efforts ! Le peuple faisait peur. Le dépôt aux archives fut ordonné.

A neuf heures et demie du soir, M. Dupin, qui n’avait eu que deux heures pour rédiger son rapport, vint en faire la lecture. Il était tard. Les députés étaient accablés de fatigue. Mais on voulait commencer la discussion immédiatement. MM. Benjamin Constant et Salverte s’élevèrent avec tant de force contre le scandale d’une telle précipitation, que la chambre, par pudeur, ajourna la discussion au lendemain.

Le lendemain, dès huit heures, on vit arriver les députés au Palais-Bourbon. Les journalistes étaient absents, les tribunes désertes. Cela tenait à ce que la veille on avait fixé à dix heures le commencement de la séance. Or, pendant la nuit, les meneurs de la bourgeoisie avaient fait distribuer aux députés une convocation extraordinaire qui avançait l’ouverture de la séance, tant on redoutait les regards du public !