Page:Blanc - Histoire de dix ans, tome 1.djvu/486

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sous la cocarde tricolore : « Quelles que soient, dit-il, en terminant, les destinées qui attendent M. le lieutenant-général, je ne serai jamais son ennemi s’il fait le bonheur de ma patrie. Je ne demande à conserver que la liberté de ma conscience et le droit d’aller mourir partout où je trouverai indépendance et repos. »

Ces plaintes éloquentes tombaient sur des cœurs glacés. La pairie ne discuta que la mesure qui tendait à la décimer. Mais l’atteinte portée à sa dignité par l’autre chambre la trouvait tellement insensible, que, sur la question de savoir si elle serait aussi outrageusement mutilée, elle déclara s’en rapporter à la haute prudence du prince. Elle ajoutait elle-même à son humiliation par cette éclatante flatterie. Une députation fut nommée pour aller porter au Palais-Royal les félicitations de ce premier corps de l’État. Elle s’avança vers le prince, respectueuse et calme sous l’injure. Le prince fit à ces grands seigneurs une réponse banale. La pairie était déjà morte en France.

Il ne restait plus qu’à donner à la transmission de la couronne la sanction des formes et ce genre de légitimité que l’imbécillité publique attache au prestige d’un cérémonial imposant. Tout fut donc préparé le lundi, 9 août, pour une séance royale. On éleva, au Palais-Bourbon, un trône ombragé de drapeaux tricolores et surmonté d’un dais en velours cramoisi. Devant le trône trois pliants étaient disposés pour le lieutenant-général et ses deux fils aînés. Une table recouverte de velours, où se trouvaient l’écritoire et la plume devant servir à la si-