Page:Blanc - Histoire de dix ans, tome 1.djvu/62

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général que celui dont la première invasion avait été l’objet. Il faut le dire, à la louange d’une portion de la bourgeoisie, elle ne put se défendre d’un sentiment de tristesse et de pudeur. Le spectacle des habitants de la campagne se réfugiant éplorés dans la ville avec leurs effets et leurs troupeaux, disait assez quel changement s’était introduit dans les dispositions des alliés : on les craignait. Et pourtant… mais non : la postérité ne voudra jamais croire à cet excès d’opprobre, on dansa sur le gazon, à jamais profané, des Tuileries, à quelques pas du pont des Arts, où nos ennemis avaient braqué deux pièces de canon prêtes à faire feu sur nos édifices ! Semblables à ces sauvages qui s’entrelacent et tournent autour d’un ennemi vaincu, des Français osèrent nouer autour de la patrie saignante d’abominables farandoles. Les étrangers virent cela ; ils nous méprisèrent.

Ainsi s’ouvrit en France l’ère des intérêts matériels.

Ceux-là, du reste, purent un moment se réjouir dans leur égoïsme, qui avaient supputé ce que rapporterait en argent une humiliation jusqu’alors sans exemple. Car, pour dernier trait d’avilissement, les vaincus se laissèrent gorger d’or par les vainqueurs. Paris se vendit en détail après s’être livré en bloc, et n’eut pas même le mérite d’une infamie désintéressée. « Les marchands décuplaient leurs recettes habituelles ; tous les jeunes officiers