Page:Blanc - Histoire de dix ans, tome 2.djvu/18

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des victoires semblables que périssent les empires. Les puissances chrétiennes étant intervenues en faveur de la Grèce par le traité du 28 juillet 1827 et par le combat de Navarin, Mahmoud chercha vainement autour de lui une armée ; il se vit réduit à prêcher contre la Russie une croisade qui attirait sur lui la tempête, sans lui fournir les moyens de la conjurer : la milice nouvelle, favorisée d’abord par la fortune, ne put cependant interdire aux Russes le passage des Balkans ; et le traité d’Andrinople, arraché à l’épouvante du réformateur, vengea les janissaires en donnant à la Russie victorieuse une plus large part des dépouilles de la Turquie.

Ainsi Mahmoud, en 1830, se trouvait avoir accru son pouvoir en détruisant son peuple ; et à chaque réforme conquise sur les ennemis du dedans répondit une perte de territoire consentie au profit des ennemis du dehors. La caserne des janissaires était brûlée, mais la Grèce affranchie ; le divan était arraché à la domination mystique des ulémas, mais, dans les traités de 1815, le cabinet de Saint-Pétersbourg avait fait rayer le nom de la Turquie, comme celui d’un royaume à partager. Les Turcs portaient un costume européen, et faisaient l’exercice à l’européenne ; mais, déjà vassale de cette civilisation dont elle semblait n’avoir adopté les traditions que pour en subir la souveraineté, Constantinople entendait les Russes frapper à ses portes. Mahmoud n’était plus que le chef tout puissant d’un empire réduit à l’impuissance. Des efforts prodigieux n’avaient pu le conduire qu’à régner en dictateur sur des ruines faites par lui-même.