Page:Blanc - Histoire de dix ans, tome 3.djvu/151

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la vérité brillait à ses yeux, une vérité jusqu’alors méconnue par lui, il se rendait aussitôt ; car chez lui l’amour du progrès était irrésistible et la modestie pleine de courage. Incapable, toutefois, d’immoler à un vain désir de popularité ce qu’il y avait de modéré dans ses opinions et d’un peu aristocratique dans ses allures, son ascendant sur son parti n’était que celui d’un esprit altier, d’un talent reconnu et loyal. Il possédait au plus haut point le commandement ; il passionnait ses amis : c’était un caractère. A ses ennemis il inspirait une crainte mêlée de confiance ; ils sentaient qu’au jour d’une réaction prévue, leur sauvegarde serait dans la modération de cet homme et dans sa générosité impérieuse. De fait, les systèmes de violence lui répugnaient ; les théories américaines lui plaisaient par tout ce qu’elles accordent à la liberté individuelle et à la dignité de la nature humaine. Il fut long-temps girondin par sentiment ; et il lui en coûta beaucoup pour s’incliner devant la majesté de cette dictature révolutionnaire l’effroi, la gloire, le désespoir et le salut de la France. Bien que l’Empire l’eût tenté par ses côtés glorieux, il se révoltait contre les insolences de la force organisée, et trouvait une sorte de jouissance hautaine à flétrir la brutalité des militaires de cour, que, dans son langage énergique, il appelait « des traîneurs de sabre. » Malheureusement, il croyait trop aux prodiges de la discipline, lui qui, néanmoins, avait été encore plus conspirateur que soldat. Un peuple soulevé peut-il l’emporter sur un régiment fidèle au drapeau ? C’est ce qu’Armand