Page:Blanc - Histoire de dix ans, tome 3.djvu/59

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Les fabricants, au nombre de huit cents environ, formaient une troisième classe, placée entre les chefs d’atelier et ceux qui, sous le nom de commissionnaires, étaient chargés de fournir la matière première, agents parasites, et véritables sangsues de l’industrie lyonnaise. Ainsi, les commissionnaires pesaient sur les fabricants, qui, à leur tour, opprimaient les chefs d’atelier ; et ceux-ci étaient forcés d’appesantir sur les compagnons le joug qu’ils subissaient eux-mêmes. De là une oppression de tous les instants ; de là, au sein de la classe soumise au fardeau de toutes ces tyrannies superposées l’une à l’autre ces haines sourdes qui fermentent dans les cœurs et unissent par s’en échapper en cris de colère.

Toutefois, la prospérité de la fabrique lyonnaise avait pendant long-temps conjuré le danger. Tant que le travail ne leur avait pas été imposé à des conditions homicides, les ouvriers lyonnais s’étaient contentés du modique salaire qui les faisait vivre. Mais des circonstances étrangères et antérieures à la révolution de juillet vinrent porter atteinte à la fabrication lyonnaise. De nombreux métiers de soierie s’étaient établis à Zurich, à Bâle, à Berne, à Cologne ; et l’Angleterre, de son côté, s’affranchissait peu à peu du tribut industriel qu’elle avait long-temps payé à la ville de Lyon. À cette cause de ruine pour les ouvriers s’en joignit une plus active encore. Depuis 1824, le nombre des fabricants lyonnais s’était accru dans une proportion très-forte, et aux effets de la concurrence étrangère qui, après tout, ne portait guère que sur les étoffes unies, étaient ve-