miers jours de la réaction qu’on parut se plaire à appesantir sur les détenus politiques de Sainte-Pélagie le fardeau de la captivité. L’ordre qui condamnait les plus compromis à l’effroyable supplice du secret, une fois levé, le séjour de la prison devint, pour tous, fort tolérable. Le directeur de Sainte-Pélagie, M. Prat, était un homme qui semblait tenir en réserve pour les prisonniers ordinaires tout ce qu’il y avait en lui de finesse, de sévérité, et qui ne manquait, à l’égard des prisonniers politiques, ni de laisser-aller ni d’indulgence. On l’effrayait aisément en lui montrant l’émeute en perspective ; car l’appel aux baïonnettes lui répugnait. D’ailleurs, il subissait l’ascendant de certains détenus ; et M. Armand Marrast, entr’autres, avait pris sur lui un empire dont rien n’égalait le spirituel et plaisant despotisme. M. Gisquet lui-même, quoique préfet de police, n’était pas sans adoucir, quand l’occasion s’en présentait, le sort des détenus. Ceux d’entre eux qui avaient besoin, pour des affaires urgentes, de quelques heures de liberté, obtinrent de lui, plus d’une fois, la permission de sortir sans escorte ; et toutes les lettres adressées à des personnages considérables ne restèrent pas sans réponse, comme celle que nous avons citée plus haut.
Malheureusement, la modération des agents supérieurs disparaissait souvent, pour ne laisser place qu’à la brutalité des subalternes, et les prisonniers étaient alors victimes des traitements les plus odieux. Souvent aussi, pour des fautes très-légères, on infligeait aux prisonniers des punitions vraiment barbares. Onze jeunes gens, dont le plus âgé n’avait