Page:Blanc - Histoire de dix ans, tome 5.djvu/344

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puissante pour le bien que pour le mal, il tremblait de lui confier des moyens d’action aussi étendus, aussi redoutables. Il se rappelait avec effroi le sort des millions engloutis dans la construction des canaux. Il se rappelait à quelles critiques fondées avaient donné lieu la concession du chemin de fer de Paris à Saint-Germain, et celles des deux chemins parallèles de Paris à Versailles. Dans une telle situation, ne valait-il pas mieux retarder l’exécution des grandes lignes ? Ainsi pensa M. François Arago, et il n’hésita pas à conclure à l’ajournement dans son rapport sur les chemins de fer, travail lumineux, d’une élégance rare, et aussi savant qu’on devait l’attendre de son illustre auteur.

« L’expérience a montré, disait M. François Arago, qu’un cheval de force moyenne, marchant au pas pendant neuf à dix heures sur vingt-quatre, et de manière à se retrouver chaque jour dans les mêmes conditions de force, ne peut pas porter sur son dos au-delà de cent kilogrammes. Ce même cheval, sans se fatiguer davantage, si on l’attelé à une voiture, portera, ou plutôt traînera à une égale distance :

Sur une bonne route ordinaire empierrée. 
 1,000 k.
Sur un chemin de fer. 
 10,000
Sur un canal. 
 60,000

L’auteur inconnu de la substitution du roulage ou transport en voiture, au transport à dos de cheval, fut donc, vous le voyez, Messieurs, un bienfaiteur de l’humanité ; il réduisit, par son invention, le prix des transports au dixième de leur valeur primitive.