Page:Blanc - Histoire de dix ans, tome 5.djvu/377

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Il serait difficile de peindre quelle fut, à ces mots, la stupeur de MM. Debelleyme, de Jussieu et de la Pinsonnière. Ils s’expliquaient mal que M. Dupin, porté au fauteuil de la présidence par les suffrages du parti ministériel, se rangeât si facilement du parti des coalisés : il se décidait bien tard ! et il allait du côté des victorieux !

Le 4 janvier 1839, la Chambre eut connaissance du projet d’adresse, et l’on devine combien furent divers et emportés les sentiments qu’il excita. Les uns ne se possédaient pas de joie et se répandaient en éloges. Les autres s’indignaient : MM. Guizot et Thiers osaient donc tendre la main, comme Opposition, à cette Pologne qu’ils avaient abandonnée comme gouvernement ! Ce trône qu’ils avaient autrefois couvert de la sanglante égide des lois de septembre, voilà qu’eux-mêmes ils venaient le livrer aux coups des partis en fureur ! On remarquait, en outre, qu’impitoyable pour les actes du ministère Molé, le projet d’adresse était, en ce qui concernait l’avenir, d’une réserve excessive ; et l’on concluait de là que les rédacteurs, qui entendaient redevenir ministres, n’avaient voulu se lier par aucun engagement. Eh quoi ! eux qui s’exprimaient d’une manière si nette sur la nationalité polonaise, déjà sacrifiée, ils n’avaient rien trouvé à dire sur la nationalité belge en péril, que ces mots cruellement vagues : Nous attendons le résultat des négociations ! La réticence n’était-elle pas significative ? Ne suffisait-elle pas pour trahir derrière l’étalage des principes la présence des ambitions ?

Tels étaient les discours par lesquels on s’animait