Page:Blanc - Histoire de dix ans, tome 5.djvu/398

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cable, aussitôt que de communs dangers auraient cessé d’assaillir ces deux puissances rivales et, au fond, ennemies. En effet, à peine délivrée de la crainte des insurrections et de celle de la guerre, la bourgeoisie se mit à avoir peur de la royauté. Alors se manifestèrent les vices du régime si follement appelé l’équilibre des pouvoirs. Un cri prolongé retentit contre le gouvernement personnel de Louis-Philippe ; la prérogative parlementaire trouva partout des publicistes, elle eut partout des vengeurs, elle transforma en tribuns des hommes qui s’étaient jusqu’alors montrés fanatiques dans le sens contraire ; M. Molé et ses collègues furent dénoncés comme les secrétaires du roi, comme ses complaisants et les lustres allumés pour le mariage du prince royal n’étaient pas encore éteints, que déjà l’on demandait compte au chef de la bourgeoisie, devenu le restaurateur du palais de Versailles, de sa tendance à recommencer la monarchie absolue. On a vu combien ce mouvement fut général et emporté. Pour humilier le roi, pour le punir de ses préférences, pour enchaîner son action, pour le réduire enfin au rôle de monarque-automate, des hommes qui s’étaient juré une haine immortelle se rapprochèrent tout-à-coup et se tendirent la main, s’honorant de combattre sous des drapeaux fraternellement confondus. Si bien que, de la rue, l’émeute monta dans le parlement. La coalition, il est vrai, se composait de beaucoup de vanités froissées, d’ambitions mécontentes, d’intérêts particuliers en souffrance, de petites passions, en un mot ; mais elle n’aurait pas à ce point remué le pays électoral, elle