Page:Blanc - Histoire de dix ans, tome 5.djvu/60

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Ce fut dans l’audience du 9 juillet que M. Martin (du Nord) prononça son réquisitoire. Il fit ressortir avec beaucoup de force de chaleur et de raison, tout ce qu’il y a dans l’assassinat politique de barbare et d’insensé ; mais il méconnut la gravité de sa mission et manqua de respect à la vérité lorsqu’il s’écria « Consultez tous les documents de l’Instruction, demandez-vous quel est Alibaud. Vous le verrez dominé par les inclinations les plus vicieuses, plongé dans la misère par la paresse et la vanité, maudire une existence qui n’était pour lui qu’un fardeau et une honte. » L’instruction à laquelle le procureur-général en appelait l’avait d’avance démenti.

M. Charles Ledru ne pouvait qu’implorer en faveur de son client la clémence des juges. C’est ce qu’il fit en termes touchants et convenables. Il montra dans l’accusé, à côté des égarements du fanatisme, des sentiments nobles et des germes de vertu. « Messieurs les pairs, s’écria-t-il en finissant, je vous convie à la clémence. L’accusé n’en veut pas repoussez ses vœux, couvrez-le de votre pardon. Non, il ne doit pas périr, vous devez le sentir comme moi. Vous ne ferez pas tomber cette tête si noble, au milieu même de l’effroi que la fermeté d’Alibaud vous inspire… Encore un mot, Messieurs cette nuit, dans l’agitation où m’a plongé cette affaire terrible, ne sachant que dire pour cet homme et n’apercevant qu’abîmes devant moi, je jetai les yeux sur un livre, je l’ouvris. C’était Corneille. Et j’y lus, Messieurs, qu’un jour Auguste découvrit la conspiration