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ORGANISATION

avaient bu de l’eau-de-vie, fermé et calfeutré la fenêtre de leur chambre, et préparé le charbon qui devait les asphyxier. La fille Cœlina Bronn s’était mise au lit : « Nous allons bientôt mourir ! Lui aurait dit Chevreuil. — oui, oui, » aurait-elle répondu, en balbutiant ces mots : « pas encore, attends ! » ces paroles furent suivies d’attaques de nerfs, que l’accusé dit avoir calmées avec un verre d’eau sucrée. La fille Bronn, un peu remise, reprit : « tu vas mourir, mon bon Julien, tu as allumé le charbon, endormons-nous. » elle s’endormit en effet. Cependant le charbon n’était pas allumé ; à en croire l’accusé, il avait craint que, dans ses attaques, la fille Bronn ne tombât sur le brasier et ne se brûlât. C’est dans cet instant, dit-il, qu’il conçut la pensée d’étouffer cette malheureuse, et qu’ayant de nouveau bu de l’eau-de-vie pour s’enhardir, il fit fondre de la poix, l’étendit sur une toile, et l’appliqua sur le visage, de façon que la bouche et les narines fussent entièrement couvertes. Annette Bronn mourut en peu d’instants ; Chevreuil prétend qu’il n’a plus eu le courage d’allumer le charbon, ni de se donner la mort d’une autre manière ; mais qu’il s’est hâté de descendre au poste pour se livrer à la justice. »

Cette pauvre fille que son amant vient d’étouffer sous un masque de poix n’était pas une