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Page:Blandy - L Oncle Philibert.djvu/178

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geolent, et qui est aussi malade que Pétrus. Il n’y a qu’un devoir au monde dans toute occasion : les uns le remplissent coûte que coûte ; les autres trouvent toujours des raisons pour s’en dispenser. Mais ces raisons-là sont mauvaises. »

Sans doute Joseph Courot eut vent de ces propos, dont le bruit alla crescendo selon la coutume des villages, car il envoya cent francs aux Ravières pour l’orphelin. Claude Chardet trouva la somme mesquine, peu en rapport avec la fortune des Courot et surtout avec le service rendu ; mais il ne crut pas avoir le droit de la refuser sans l’assentiment de la veuve.

Vittorio n’était plus ce garçon vif, aimable qui animait le domaine de sa gaieté ; il parlait à peine à ses jeunes amis, comme s’il eût craint de les attrister en leur dévoilant l’étendue de sa douleur. Il passait tout son temps sur la tombe de son père ou dans la chambre de Sauviac, à toucher les objets qui lui avaient appartenu, ou bien encore auprès du fidèle compagnon de leurs voyages à travers la France, auprès d’Asicot qui s’était refait à l’écurie des Ravières, mais qui était las peut-être de ce bien-être inaccoutumé. Il frappait du pied avec impatience et tirait sur sa longe toutes les fois que Vittorio venait l’embrasser sur sa tête busquée et flatter ce pelage rude que Sauviac avait tant de fois caressé après les longues étapes de la journée.

Le reste du temps, Vittorio s’attachait aux pas de Mme Chardet, mais sans lui parler et peut-être afin de sentir le muet bienfait d’une présence sympathique. Pour consoler le jeune garçon, celle-ci faisait allusion le plus souvent à la prochaine arrivée de sa mère ; pourtant elle finit par s’apercevoir que ce sujet de causerie rembrunissait la physionomie de l’orphelin au lieu de l’éclaircir. Elle se demanda si ce jeune garçon, si bien doué du côté de l’intelligence, manquait de cœur ;