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Page:Blandy - L Oncle Philibert.djvu/181

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mais elle se reprocha cette idée. L’abattement de Vittorio témoignait, en effet, d’une tendresse extrême pour le père qu’il venait de perdre.

Afin d’expliquer cette singulière disposition, tante Catherine se dit qu’ayant toujours vécu foin de sa mère, Vittorio ne l’appréciait pas autant qu’il le devait. Quand elle lui en fit doucement l’observation, l’enfant resta muet ; mais sa figure ne prit pas l’expression de repentir que devait produire cette gronderie amicale.

Le surlendemain de l’enterrement, Claude Chardet revenait vers midi de son bien de la Beleuze. En traversant la place du Château, il fut interpellé par une des belles parleuses de ce quartier qui, tout en cousant du linge sur le pas de leur porte, devinent où vont et d’où viennent les passants, poussent la perspicacité jusqu’à savoir ce qu’ils pensent, et la finesse d’ouïe jusqu’à entendre ce qu’ils disent dans les maisons où ils entrent.

« Eh bien, maître Chardet, lui dit la Reine Michelon en posant son aiguille, vous voilà bientôt hors d’embarras. Elle est arrivée, votre Bourbonnaise.

— Ma Bourbonnaise ! répéta Claude Chardet si étonné qu’il s’arrêta, lui qui faisait profession de ne jamais écouter celles qu’il appelait avec plus de dédain que d’injustice les bavardes de la place du Château.

— Eh ! oui, la mère de ce petit garçon que vous avez chez vous et qui n’a pas un nom chrétien.

— Ah ! ah ! c’est donc une Bourbonnaise ? j’aurais cru plutôt une Auvergnate.

— Le drap est si près de la lisière… mais elle a bien un chapeau bourbonnais tout drôle, levé par derrière, baissé ici, perché sur sa tête comme un cabriolet bossu.

— C’est bon, c’est bon, je m’en vais la voir, dit le maître