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Page:Blandy - Le Petit Roi.djvu/113

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en chien de bonne maison, regarda dédaigneusement l’intrus, qui, de son côté, se prit à contempler le chinois avec l’admiration rustique d’un villageois mal attifé pour un citadin. Ce n’était pas l’affaire de Stéphane qui ne rêvait que bataille. Il appela Ermolaï et lui commanda d’apporter un quartier de viande cuite.

Mlle Mertaud, occupée dans sa chambre, entendit cet ordre et se mit à sa fenêtre pour savoir ce qu’il signifiait ; elle eut d’autant moins de peine à le deviner qu’elle se rappela que Stéphane avait fait fête devant elle à son cousin de cette lutte, dont celui-ci avait refusé d’être spectateur.

La gouvernante fut sur le point d’interdire à Stéphane ce jeu cruel ; mais elle avait si peu réussi jusqu’alors à le convaincre de la déraison de ses amusements, qu’elle résolut de n’intervenir qu’à la dernière extrémité. Elle descendit néanmoins, et se mit en observation derrière la porte vitrée du vestibule.

Stéphane était trop occupé pour la remarquer. Ermolaï lui avait apporté un gros morceau de viande, et il venait de le jeter à Mandarin, comptant que le chien de Crimée viendrait le lui disputer. Mais Mandarin était trop bien nourri pour se soucier de cette grossière pitance : il flaira la viande en fronçant ses narines et se coucha tout à côté sans y porter la dent. L’autre chien, qui s’était borné jusque-là à la mimique sournoise d’un intrus hésitant entre une prise de possession brutale et des désirs