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Page:Blasco-Ibáñez - Les Quatre Cavaliers de l’Apocalypse.djvu/163

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éprouvait un besoin de sacrifice ; elle avait hâte de connaître de près les souffrances des humbles, de prendre sa part de toutes les misères de la chair malade. La seule chose dont elle avait peur, c’était que le sang-froid vînt à lui manquer, lorsqu’elle aurait à mettre en pratique ses connaissances d’infirmière. La vue du sang, la mauvaise odeur des blessures, le pus des plaies ouvertes ne lui soulèveraient-ils pas le cœur ? Mais non ! Le temps était passé d’avoir des répugnances de femmelette ; aujourd’hui le courage s’imposait à tout le monde. Elle serait un soldat en jupons ; elle oserait regarder la douleur en face ; elle mettrait son bonheur et son honneur à défendre contre la mort les pauvres victimes de la guerre. S’il le fallait, elle irait jusque sur les champs de bataille, et elle aurait la force d’y charger un blessé sur ses épaules pour le rapporter à l’ambulance.

Jules ne la reconnaissait plus. Était-ce vraiment Marguerite qui parlait ainsi ? Cette femme qui jusqu’alors avait eu en horreur d’accomplir le moindre effort physique, se préparait maintenant avec une frémissante ardeur aux besognes les plus rudes, se croyait assez forte pour vaincre tous les dégoûts qu’inspirent inévitablement les pestilences des hôpitaux, ne s’effrayait pas à l’idée d’aller aux premières lignes avec les combattants et d’y affronter la mort.