retrouveraient-ils jamais ? Ces malheureux n’étaient-ils pas morts de fatigue et de faim ?
Ce soir-là, Marcel, encore tout ému de ce qu’il venait de voir, ne put s’empêcher de prononcer contre l’empereur Guillaume des paroles véhémentes qui, à la grande surprise de tout le monde, firent sortir Héléna de son mutisme.
— L’Empereur est un homme excellent et chevaleresque, déclara-t-elle. Il n’est coupable de rien, lui. Ce sont ses ennemis qui l’ont provoqué.
Alors Marcel s’emporta, maudit l’hypocrite Kaiser, souhaita l’extermination de tous les bandits qui venaient d’incendier Louvain, de martyriser des vieillards, des femmes et des enfants. Sur quoi, Héléna fondit en larmes.
— Tu oublies donc, gémit-elle d’une voix entrecoupée par les sanglots, tu oublies donc que je suis mère et que mes fils sont du nombre de ceux sur qui tu appelles la mort !
Ces mots firent mesurer soudain à Marcel la largeur de l’abîme qui le séparait de cette femme, et, dans son for intérieur, il pesta contre la destinée qui l’obligeait à la garder sous son toit. Mais comme, au fond, il avait bon cœur et ne trouvait aucun plaisir à molester inutilement les personnes de son entourage :
— C’est bien, répondit-il. Je croyais les victimes plus dignes de pitié que les bourreaux. Mais ne par-