Page:Blasco-Ibáñez - Les Quatre Cavaliers de l’Apocalypse.djvu/20

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cette amitié, chaque fois que l’occasion s’en présentait.

— Malheureusement, reprit l’industriel sur un ton plaintif, la France se montre hargneuse avec nous. Il y a des années que notre empereur lui tend la main avec une noble loyauté, et elle feint de ne pas s’en apercevoir. Vous reconnaîtrez que cela n’est pas correct.

Jules ne s’occupait jamais de politique, et cette conversation trop austère commençait à l’ennuyer. Pour y mettre un peu de piquant, il eut la fantaisie de répondre :

— Avant de prétendre à l’amitié des Français, peut-être feriez-vous bien de leur rendre ce que vous leur avez pris.

À ces mots il se fit un silence de stupéfaction, comme si l’on eût sonné sur le transatlantique la cloche d’alarme. Plusieurs, qui portaient le cigare à leurs lèvres, demeurèrent la main immobile à deux doigts de la bouche, les yeux démesurément ouverts. Ce fut le capitaine de landsturm qui se chargea de donner une forme verbale à cette muette protestation.

— Rendre ! s’écria-t-il, d’une voix qui semblait assourdie par le soudain rehaussement de son col. Nous n’avons rien à rendre, pour la bonne raison que nous n’avons rien pris. Ce que nous possédons, nous l’avons gagné par notre héroïsme.

Devant toute affirmation faite sur un ton altier,