Page:Blasco-Ibáñez - Les Quatre Cavaliers de l’Apocalypse.djvu/30

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et séjourner en rade jusqu’à l’aube pour permettre aux voyageurs un débarquement plus commode. Or il arriva à dix heures, jeta l’ancre loin du port, et le commandant donna des ordres pour que le débarquement se fît à l’instant même. Il fallait repartir le plus tôt possible : les appareils radiographiques ne fonctionnaient pas pour rien.

À la lumière des feux bleus qui répandaient sur la mer une clarté livide, commença le transbordement des passagers et des bagages à destination de Paris. Les matelots bousculaient les dames qui s’attardaient à compter leurs malles ; les garçons de service emportaient les enfants comme des paquets. La précipitation générale abolissait l’excessive obséquiosité germanique.

Jules, descendu sur un remorqueur que les ondulations de la mer faisaient danser, se trouva en bas du transatlantique dont le flanc noir et immobile ressemblait à un mur criblé de trous lumineux, mur au-dessus duquel s’allongeaient comme d’immenses balcons les garde-fous des ponts chargés de gens qui saluaient avec leurs mouchoirs. Puis la distance s’élargit entre le transatlantique qui partait et les remorqueurs qui se dirigeaient vers la terre. Et tout à coup une voix de stentor, celle du capitaine Erckmann, cria du bateau, dans un accompagnement d’éclats de rire :

— Au revoir, messieurs les Français ! Nous nous reverrons bientôt à Paris !