Page:Blasco-Ibáñez - Les Quatre Cavaliers de l’Apocalypse.djvu/60

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d’autres choses encore. Madariaga ne lui adressait jamais la parole, et, lorsque Héléna saisissait quelque prétexte pour amener au grand-père le petit Julio :

— Le marmot de ton chanteur ! disait-il avec mépris.

Il semblait que le qualificatif de « chanteur » signifiât pour lui le comble de l’ignominie.

Le temps s’écoula sans apporter beaucoup de changement à la situation. Marcel, à qui Madariaga avait entièrement abandonné le soin du domaine, aidait sous main son beau-frère et sa belle-sœur, et Hartrott lui en montrait une humble gratitude. Mais le vieux s’obstinait à affecter vis-à-vis de « la romantique » et de son mari une dédaigneuse indifférence.

Après six ans de mariage, la femme de Marcel mit au monde un garçon qu’on appela Jules. À cette époque, sa sœur Héléna avait déjà trois enfants. Six ans plus tard, Luisa eut encore une fille, qui fut nommée Luisa comme sa mère, mais que l’on surnomma Chichi. Les Hartrott, eux, avaient alors cinq enfants.

Le vieux Madariaga, qui baissait beaucoup, avait étendu à ces deux lignées la partialité qu’il ne perdait aucune occasion de témoigner aux parents. Tandis qu’il gâtait de la façon la plus déraisonnable Jules et Chichi, les emmenait avec lui dans le domaine, leur donnait de l’argent à poignées, il était aussi revêche que possible pour les rejetons de Karl et il les