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BOULANGERIE, 14-17.

de boucherie, sans qu’il soit permis, en aucun cas, de l’étendre sur le vin, sur le blé, les autres grains, ni autre espèce de denrées ; et ce, sous peine de destitution des officiers municipaux. »

Par suite des lois rendues depuis lors sur l’organisation municipale, le droit de taxe est exercé par les maires, qui n’ont qu’à consulter leurs propres appréciations sur la question de savoir s’ils doivent ou non en faire usage.

Pendant tout le temps et dans toutes les communes où le commerce de la boulangerie a été placé sous le régime d’une réglementation étroite dont la base principale était la limitation du nombre des boulangers, la taxe a été appliquée. Elle est, en effet, le corollaire et le correctif obligé du monopole attribué à un certain nombre d’industriels par les obstacles mis au développement de la concurrence.

Mais depuis que le décret du 22 juin 1863 a replacé la boulangerie sous le régime du droit commun, la suppression de la taxe officielle du pain parait devoir être, dans un avenir plus ou moins prochain, la conséquence du système de liberté qui a prévalu. Seulement, il est certain qu’on rencontre encore fréquemment à cet égard, dans l’opinion publique, dans les habitudes des populations et dans l’esprit des administrations locales, des dispositions peu favorables, et bien des maires, soit par goût pour le régime de la réglementation, soit par crainte de la responsabilité qui leur incombe, croient devoir maintenir la taxe dans leurs communes ; quelques-uns, après l’avoir momentanément supprimée, jugent à propos de la rétablir. Ils agissent, en pareil cas, sous leur seule responsabilité, et la surveillance de l’administration supérieure s’exerce seulement sur les tarifs de taxe, dont elle contrôle les éléments afin d’éviter autant que possible que l’arbitraire vienne se substituer à des règles fixes et à des procédés réguliers. C’est du temps seulement que l’on doit attendre l’accomplissement complet d’une réforme indiquée par les principes économiques dont la liberté du commerce est la base, mais qu’on ne saurait brusquer sans heurter des habitudes et des convictions qui ont encore une grande force.

14. Taxe du pain à Paris. La taxe du pain n’est plus appliquée à Paris depuis le 1er septembre 1863, mais il y a un certain intérêt à rappeler succinctement comment on procédait en pareille matière dans une ville de cette importance.

La taxe du pain de la consommation la plus générale ne remonte pas, à Paris, à une époque très-ancienne. C’est seulement dans le milieu du xviiie siècle que l’établissement de la halle aux grains et farines et la régularité qui s’ensuivit dans le commerce de ces denrées, fournirent à l’administration les moyens qui lui manquaient jusqu’alors d’établir le prix du pain d’après celui des farines. Du reste, la taxe du pain était un objet d’administration intérieure qu’aucun acte public n’annonçait. Les boulangers ne pouvaient augmenter le prix du pain sans la permission de l’autorité, et en cas de hausse du prix des blés ou des farines, leurs syndics faisaient une demande d’augmentation au lieutenant-général de police qui accordait ou différait. Il n’y avait pas de règles précises pour déterminer les éléments qui concouraient à établir le tarif de la taxe, tels que les frais de panification alloués aux boulangers et le rendement de la farine en pain.

15. C’est en 1811 seulement que des bases fixes furent adoptées à cet égard. Le conseil des subsistances établi près du ministère de l’intérieur décida qu’il serait accordé aux boulangers 9 fr. 40 c. pour frais de fabrication d’un sac de farine, et il fixa à 104 pains de 4 livres le produit du sac de farine du poids brut de 159 kil. (157 kil. poids net). Sauf quelques changements, cet état de choses subsista jusqu’en 1823. Le prix du pain était taxé à des époques indéterminées. Dans ce système, qu’on a désigné sous le nom de taxe instantanée, le prix de vente n’était changé que lorsque l’autorité le jugeait à propos. Souvent des considérations politiques le faisaient maintenir au-dessous du taux résultant du cours des farines, et dans les temps de bon marché on indemnisait les boulangers en tenant le pain à un prix supérieur à sa valeur réelle.

16. En 1823, sur l’initiative de la préfecture de police et du conseil d’administration de la caisse syndicale des boulangers, on adopta le système de la taxe périodique, c’est-à-dire d’une taxe révisée et publiée régulièrement à des époques fixes et rapprochées de manière à établir une relation constante entre le prix du pain et celui des farines. Une ordonnance de police du 24 juin 1823 établit cette taxe périodique, et, en conséquence, à partir du 1er juillet 1823, le pain dut être taxé tous les quinze jours, le 1er et le 16 de chaque mois, d’après les mercuriales établissant le prix moyen des farines pendant la quinzaine précédente. Les autres éléments de la taxe furent fixés à la suite d’expériences et de recherches destinées à en assurer l’exactitude aussi complète que possible. Les frais de panification alloués aux boulangers furent d’abord de 10 fr., puis ils furent portés à 11 et à 12 fr. par sac de farine, soit 7 fr., puis 7 fr. 60 c. par quintal métrique ; le rendement de la farine en pain fut évalué à 102 pains de 2 kil. par sac de farine, soit 130 kil. de pain par quintal de farine mise en œuvre. Ce mode de procéder fut employé jusqu’à la suppression de la taxe, à la suite du décret du 22 juin 1863 qui avait rendu la boulangerie libre.

Depuis lors, il a été encore fait usage de la taxe obligatoire pendant le siége de Paris, mais d’une façon assez irrégulière. Enfin, le 1er juin 1871 la taxe a cessé d’être appliquée et elle n’a pas été rétablie depuis.

chap. iii. — caisse de la boulangerie de paris et du département de la seine.

17. Bien que cette caisse n’existe plus, il peut être utile, pour compléter l’historique de la question de la boulangerie, de donner quelques détails sur son organisation, l’institution des caisses de cette nature ayant paru, à une certaine époque, pouvoir être un des éléments du régime réglementaire applicable au commerce du pain.

Au début de la crise qui suivit la mauvaise récolte de l’année 1853, le Gouvernement et l’administration municipale de la ville de Paris cherchèrent une combinaison propre à assurer à la population l’avantage d’une réduction du prix du pain en temps de cherté, sans imposer de sacri-